Bien que petite en taille, l’exposition du musée de l’Orangerie, à Paris, consacrée à Amedeo Modigliani (1884-1920) et son marchand Paul Guillaume (1891-1934) est passionnante par le récit de cette relation fructueuse et par le choix d’œuvres peu montrées en France et venues souvent de collections privées. Pendant vingt ans, le galeriste défend l’artiste italien contre vents et marées, lui présente le tout-Paris littéraire et artistique et lui montre sa collection d’œuvres d’art non occidental qui va l’inspirer. Contrairement à l’exposition « Gertrude Stein et Pablo Picasso » au musée du Luxembourg, qui expose des œuvres n’ayant pas appartenu à la collectionneuse américaine, toutes les toiles de Modigliani montrées ici ont été vendues par Paul Guillaume ou commentées par lui dans sa revue « Les Arts à Paris ».
Vingt ans de collaboration
Si les débuts de Modigliani à Paris sont marqués par ses liens avec le médecin et collectionneur Paul Alexandre de 1904 à 1914, la suite de sa carrière est marquée par l’aide que le marchand Paul Guillaume lui apporte jusqu’à sa mort et malgré la concurrence d’un autre galeriste Léopold Zborowski. De 1920 à 1934, Paul Guillaume poursuit son action en France et aux États-Unis, où il a le docteur Barnes de Philadelphie comme important client.
Masques peints et sculptés
Dessins et sculptures constituent le principal corpus du travail de Modigliani pendant le début des années 1910. Il croque sur le papier et sculpte dans la pierre ou le marbre de Carrare de longs visages féminins. Ceux-ci rappellent certains masques africains qu’il a pu voir au musée d’Ethnographie du Trocadéro, puis dans la collection de son marchand Paul Guillaume. Modigliani s’inspire également d’œuvres égyptiennes ou khmères dont il va retenir les profils élégants.
Têtes cubistes
Conservée au Metropolitan Museum de New York, cette Lola de Valence, rappelle le portrait de la danseuse espagnole, réalisé par Édouard Manet cinquante ans plus tôt et les vers de Charles Baudelaire. Contrairement au peintre réaliste qui l’a affublée d’un visage rond, Modigliani lui donne ici de longs traits inspirés d’un masque du Congo et qu’il a déclinés dans ses sculptures des années précédentes. Ce profil sculptural et angulaire rappelle les toiles cubistes aux formes géométriques simplifiées de Picasso et Braque que Modigliani a pu voir chez son marchand qui les représentait également dans sa galerie de la rue de Miromesnil.
Muses, modèles et amis
Réformé pour raison de santé pendant la Première Guerre mondiale, Modigliani peint alors à Paris les portraits de ses relations artistiques. Du sculpteur Constantin Brancusi au peintre Moïse Kisling (ici, à droite), de l’écrivain Jean Cocteau au poète Max Jacob. Il réalise également de nombreuses toiles représentant ses modèles, muses et amantes comme la journaliste et critique d’art britannique Béatrice Hastings (à gauche). Après avoir vécu avec elle pendant deux ans, Modigliani l’abandonne pour s’installer avec une jeune modèle et étudiante en arts, Jeanne Hébuterne, qui se suicide, enceinte de son second enfant, quelques jours après la mort du peintre
Avec Léopold Zborowski
Alors que Modigliani continue de travailler avec son marchand Paul Guillaume, il rencontre le poète polonais Léopold Zborowski qui vend des tableaux en appartement à Montparnasse, rue Joseph-Bara près de Notre-Dame des Champs, ou dans sa galerie de la rue de Seine. C’est le peintre Moïse Kisling qui lui a présenté Modigliani. Celui-ci le peint plusieurs fois ainsi que sa femme, Anna Zborowska, une aristocrate polonaise dont on voit ici le long visage et les cheveux noirs tirés en l’arrière.
Sensuels et scandaleux
À partir de 1916, Modigliani se délecte à peindre des corps de femmes nues et allongées, laissant apercevoir leurs poils pubiens. Lors de l’exposition de l’un d’entre eux dans la vitrine de la galerie Berthe Weill en 1917, la police intervient et fait retirer l’œuvre jugée scandaleuse. Bien que la plupart de ces nus sensuels soit passée par les mains de Zborowski, Paul Guillaume va en vendre deux après la mort de Modigliani.
« Amedeo Modigliani. Un peintre et son marchand »
musée de l’Orangerie, 75 001 Paris
jusqu’au 24 janvier 2024
Pentru a putea adăuga comentarii trebuie să fii membru al altmarius !
Alătură-te reţelei altmarius