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cultură şi spiritualitate

Porteuse de journaux au début du XXe siècle

D’après « L’Intransigeant », paru en 1925)
Publié le SAMEDI 6 FÉVRIER 2016, par LA RÉDACTION

 
 http://www.france-pittoresque.com/spip.php?article5596
 
Narrant la journée d’une porteuse de journaux, une journaliste de l’Intransigeant nous révèle en 1925 la rudesse et le pittoresque de ce petit métier, exigeant de celle qui l’exerçait d’arpenter des rues qu’elle connaissait par cœur et de donner inlassablement de la voix pour attirer l’attention des lecteurs

« Mais non, c’est pas mauvais. Si je vends mon cent de première, j’aurai gagné 8fr.65. Si je vends mon cent de troisième, j’aurai fait mes 6 francs. Bien souvent, en même temps que ma troisième d’Intran, j’arrive à écouler un cent de Paris-Soir. Une vingtaine de francs dans mon après-midi. Je ne me plains pas. Mais il faut du courage. »

Elle ne manque pas de courage, la vieille femme qui me crie ces choses à l’oreille, écrit Nancy Geroge, du journal l’Intransigeant. La cour de l’Intran bruit d’un travail forcené. Le papier sort. Les autos partent. Les cyclistes chargés d’idées, de faits à répandre dans Paris. C’est la première. Nous, les camelots, hommes et femmes, nous attendons, pressés, à la file, notre cent ou plusieurs, selon notre clientèle. Nous sommes les truchements de cette expansion. Par notre infime canal, la pensée pénètre les replis de la ville immense, par nous, le rythme du vaste monde imprègne les existences les plus humbles et les plus cachées.

Porteuse de journaux
Porteuse de journaux
La vieille avec qui je travaille aujourd’hui reçoit et paie 11fr.35 son cent quotidien, ce qui forme un paquet assez lourd. A son autre bras est enfilée l’anse d’un cabas plein de choses assez mystérieuses, il y a un quignon de pain qui sort un peu.

A l’entrée du métro Sentier – ô miracle du cœur, élévation dans la misère –, ma vieille abandonne pour deux sous pièce, dix feuilles à une vieille plus vieille encore, au terme de l’âge et de l’infortune, chenue, voûtée et qui la guette pour en recevoir ce bienfait. La misérable va chevroter sonIntran jusqu’au soir. Si elle parvient à gagner ces vingt sous, c’est son dîner et son lit à l’asile, afin de ne pas mourir et sans autre espérance. Regardez bien les vieilles qui vendent les journaux au portail du métro, à l’entrée des théâtres.

Nous nous engouffrons dans le sépulcre qui nous assomme de son odeur, et, tout en dévalant l’escalier, j’observe que ma vieille halète un peu, déjetée par son fardeau dont à grand’ peine elle consent à me confier une part.

Elle parle, heureuse de parler. Sa voix, qu’elle force, dans le grondement qui nous emporte aux entrailles de Paris, me détaille ses luttes de vieille veuve, seule dans la vie, et son emphysème. Nous remontons au jour place Martin Nadaud et, tout de suite, une autre expression de Paris nous surprend. La hâte est moins féroce, moins brutal le commerce. Dirait-on pas que devant la mairie du 20e les arbres sont plus frais que ceux des boulevards ?

La vieille va déjà, de son pas lourd et cependant vivace. Elle m’explique que, depuis huit ans qu’elle fait sa tournée, elle a ses habitués. D’aucuns paient le mardi, d’autres le samedi, quelques-uns tous les jours, elle sait tout ça : pas besoin de carnet.

L’Intran – tous les dix pas elle crie son cri, d’un timbre rauque qui lui tire la bouche au coin. Les tenancières de petits cafés, le cordonnier, la mercière et de vieux concierges trouvant leur porte sur rue, ou leur fenêtre, tendent la main par-dessus des pots de lilas. L’Intran – elle crie, elle marche, fatiguée mais infatigable, et parfois se retrempe au sourire d’un enfant qui, sur l’ordre de sa mère, tend sa petite main serrant quatre sous.

Rue de Bagnolet, enfin, nous trouvons un moment de repos dans un débit où la porteuse prend son café, debout devant le zinc. A la façon amène dont on la sert et dont on l’interpelle, j’aperçois tout à coup le secret de sa vaillance, et celui des vies besogneuses. L’habitude sur elles étend son calme, égrène ses intervalles. Il y a une harmonie à prendre tous les jours, recrue de la même fatigue, au même débit, son café servi par le même garçon, avec le même sourire à l’identique brocart. Une consolation... une musique intérieure.

Au delà de la Barrière, les verts lavés et tendres de la campagne s’étagent jusqu’au bord du ciel. Des nuages rapides y courent, nous présageant un caprice du temps. Et le long de la rue de la Py, au bout de laquelle les arbres de la rue Belgrand font perspective ; dans les sinuosités de la rue Pelleport, à ruisseau central, où quelque vieil hôtel est caché par les arbres de son jardin, décelé par un portail aux deux boules de pierre ; rue Ramus dont les portes entrebaîllées nous dévoilent des espaces inattendus, filée de poireaux, têtes de salades, bouffée de senteur rurale, nous cheminons.

La vieille envoie son cri, qui résonne dans la rue tranquille. Elle distribue ses feuilles, roule parfois l’une d’elles en tampon dans l’orifice d’une boîte aux lettres, rite ordinaire avec la calme assurance d’une qui gagne sa vie, en accomplissant une fonction sociale.

C’est fini, le cent est vendu, sauf dix journaux qui lui restent sur le bras. Ces « bouillons » lui font de la peine. Par l’avenue du Père Lachaise, nous regagnons la mairie du 20e. La vieille se tait. Une pluie s’abat sur les marronniers, avec le bruit doux d’un papier qu’on froisse, de la cheminée du four crématoire s’élèvent des tourbillons d’une symbolique fumée.

La porteuse s’engouffre dans le métro. Elle sera tout juste à cinq heures dans la cour de l’Intran, pour la troisième, la sportive sur papier porteur qu’elle paie 14 francs le cent. De retour place Martin Nadaud, par le métro encore, elle va, jusqu’à la nuit, chanter aux citadins leur chanson vespérale : L’Intran...

Moi, je suis bien lasse : je ne vendrai pas la troisième, je quitte la vieille pour venir vous conter son travail.

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